Critique du film Black Adam : le blockbuster DC sur fond d’allégories bibliques 

Le 19 octobre Black Adam, film DC produit par Dwayne Johnson, Dany et Hiram Garcia et Beau Flynn sortait en salle. Et si début novembre il est encore à l’affiche, c’est parce que cette nouvelle création a rassemblé 319 millions de dollars au Box Office international. Pas mal ! Mais alors ce nouveau super (anti) héros mérite-t-il tout cet engouement ? Critique  et analyse (et spoiler alert). 

En ce moment, il m’est quasi impossible d’accrocher à un film. Trop long à démarrer, intrigue insipide, dialogues vides… mais je ne désespère pas ! Après la bonne surprise créée par Novembre avec Jean Dujardin, j’ai redonné sa chance au grand écran. Au programme ? Black Adam – un choix largement motivé par la présence de The Rock qui est un de mes acteurs préférés. Le film démarre. Faites qu’il soit bien ! 

Black Adam : une photographie et bande son à couper le souffle

Comme chaque film de super héros, Black Adam s’ouvre sur une légende. Ici, celle du Kahndaq, un pays sous oppression d’un roi avide de pouvoirs maléfiques et en quête d’un sauveur. Il ne faut pas longtemps pour que ce film remplisse sa part du contrat d’images ralenties, de scènes épiques et de combats sans merci. Car on ne va pas se mentir, si on savoir Black Adam, ce n’est pas pour visionner un film romantique. 

Et quel plaisir d’avoir droit à un scénario qui satisfasse les attentes de base de son audience (coucou Thor Love and Thunder). La part belle au son et à l’image, voilà un résumé juste de Black Adam. Si les scènes badass sont accompagnées d’une musique tout aussi stylée – comme Paint it Black des Rolling Stones – les scènes plus chill héritent aussi de quelques notes bien choisies. Même minutie côté image. Dès le début du film, les effets spéciaux font leur travail avec brio. Des boom. Des splash. Des étincelles. Du combat.

Personnage du Film Black Adam, Pierce Brosnan

Un Pierce Brosnan vraiment badass et au costume incroyable

Des dialogues intéressants bien qu’improbables

Si je vous dis que la scénographie et les dialogues sont comme dans Deadpool, la plupart des aficionados de ce style de film comprendront. Il y a de l’humour, des scènes improbables, des anachronismes, des plans au ralenti, des zooms bien placés. Et ce style de film, en général, ça passe ou ça casse. Un peu comme le très controversé Suicide Squad – que personnellement j’ai bien aimé. On a donc un jeune au profil très engagé – Amon – qui va avoir un rôle d’accompagnateur pour un Black Adam qui revient 5000 ans plus tard dans une civilisation dont il ne connait ni les problématiques ni les usages. 

Bon samaritain, Amon va accompagner Dwayne Johnson dans sa quête d’identité, lui conseillant de trouver un costume, un nom et une réplique badass de super héros. Le duo très improbable fonctionne bien au cours du film – bien que parfois certaines scènes soient tirées par les cheveux (depuis quand un ado de 15 ans arrive à se battre contre des dizaines de militaires armés ?). Mais c’est aussi ce loufoque qu’on aime dans ce genre cinématographique.

Un film qui fait réfléchir

Hors le scénario qui coule bien et le bon jeu des acteurs, ce qui m’a le plus plu avec Black Adam, c’est la réflexion qu’il implique. Déjà, pendant plusieurs dizaines de minutes (voire jusqu’à la fin du film), on ne sait pas si Black Adam fait partie des « gentils » ou des « méchants ». Cette entité divine, choisie par les sorciers anciens pour avoir un grand pouvoir fait s’interroger. Un des dialogues entre l’une des personnages principaux et le Hawkman de la Justice Society (qui est censée être la ligue de super héros venue arrêter le méchant Black Adam) fait prendre du recul. Elle explique : « Black Adam est venu ici pour libérer le peuple, oppressé par la police depuis 27 ans, coupé de ses ressources naturelles, et vous (la Justice Society) vous en fichiez jusqu’à son arrivée. Maintenant vous expliquez venir ici pour enlever le mal, mais selon vous seuls. Pour nous, le héros, c’est lui. » 

Cette intervention et beaucoup d’autres durant le film vient remettre en perspective les notions de bien, de mal et de point de vue. Le bien pour une personne est conditionné par son environnement et son vécu. Ce que A trouve bien ne l’est peut-être pas aux yeux de B. Le bien et le mal seraient donc des notions relatives plus qu’immuables. Et dans Black Adam, le vécu et la quête de devenir meilleur / de rédemption a une place prépondérante.

Partie du film Black Adam - Hawkeye vs Sabbac

Hawkeye vs Sabbac : une scène sortie directement de la Bible ?

Un blockbuster biblique ?

Ajoutée à ces notions de bien et de mal, j’ai trouvé en ce film toute une connotation biblique très intéressante – voulue ou non. Dans les mots utilisés d’abord « ce pouvoir est une malédiction », « notre sauveur » Sabbac – le nom du méchant. Dans les gestes ensuite : le peuple espère un monde meilleur en joignant ses mains vers le ciel, comme lors d’une prière. Puis dans l’intention. Car en plus du bien et du mal, nous observons un héros confronté à sa propre mortalité, à ses défauts, à ses faiblesses et à ses péchés capitaux. La colère, la vengeance, l’impatience. 

Un héros en quête de pardon, ne serait-ce pas la définition même d’un être humain ? Dans l’iconographie, enfin. Si la plupart du film se déroule dans une ville aux allures de Babylone, les personnages aussi sont très manichéens. Le « méchant » a un physique du diable comme on l’imagine en enfer – cornes, corps démesuré, peau rouge, pentacle sur le torse, pieds cornés, dents longues. Face à lui, on retrouve un Pierce Brosnan, aka Docteur Fate, aux cheveux et à la barbe blanche et au magnétisme incontestable, qui (spoiler) donne sa vie pour libérer le monde du mal.

Au final ?

Et avec une bonne dose d’entraide et un soupçon d’humour la Justice Society et Black Adam arrivent à libérer le peuple. Jesus is that you ? Après 2h5, le public l’est aussi. Rideau dans la salle, mais ces notions fusent encore. Notre vision du bien est-elle la même chez la personne d’à côté de nous ? Pourrions-nous supporter la pression d’être un héros et donc est-ce une bénédiction ou une malédiction ? Comment définir un héros ? Sommes-nous capables de changer ? Si oui, grâce à qui, nous même ou notre entourage ? Bref, un film que l’on pourrait étudier pour le bac de philosophie et que je conseille à tous ceux qui aiment les films de super héros. Un bon 8/10 !