C’est une première en Europe. Le gouvernement français a promulgué une loi encadrant le travail des influenceurs. Elle énonce clairement leurs droits, leurs devoirs et leurs obligations envers leurs abonnés. Cette réglementation vise à mettre un terme aux abus et aux escroqueries qui ont sévi dans le domaine de l’influence. Pendant longtemps, le manque d’encadrement de l’influence a été source de dérives et d’arnaques, surtout auprès de publics vulnérables. Une lutte initiée par Booba, qui dénonce les agissements des « influvoleurs ».
Aussitôt adoptée, aussitôt appliquée. Juste après l’approbation de la nouvelle loi sur les influenceur, le jeudi 1er juin, six personnalités coupables ont été sanctionnées. Dès à présent, lorsque des pratiques commerciales sont considérées comme trompeuses, la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) publie leur nom et les oblige à afficher des bandeaux mentionnant leurs tords sur leurs réseaux sociaux. Une sanction douloureuse pour des célébrités médiatisées attachant une grande importance à leur image. On vous explique ce que cette loi contient et implique.
Les influenceurs coupables doivent publier et épingler ce contenu donné par la DGCCRF.
Capture d’écran.
La loi sur les influenceurs interdit de faire la promotion de certains sujets
Désormais, la loi stipule que les influenceurs doivent se conformer aux réglementations légales en matière de publicité et de promotion des biens et des services (telles que la loi dite « EVIN », le code de la consommation, les normes concernant les produits gras, sucrés et salés, etc.). En outre, la loi interdit les publicités qui font la promotion de :
- la chirurgie et la médecine esthétique ;
- certains produits et services financiers (notamment concernant les crypto-monnaies) ;
- l’abstention thérapeutique ;
- sachets de nicotine (dont la vente sur Internet se développe auprès des adolescents) ;
- abonnements à des conseils ou des pronostics sportifs…
La promotion impliquant des animaux sauvages est également interdite, sauf en cas de collaboration avec des zoos. Dans le même ordre d’idées, la publicité liée aux jeux d’argent et de hasard est réglementée afin de protéger les mineurs. C’est le cas aussi pour la promotion des inscriptions à des formations professionnelles, notamment via le Compte Personnel de Formation (CPF).
En réponse aux nombreuses dérives observées dans la pratique du dropshipping (vente de produits de piètre qualité ou contrefaits, absence de livraison), les influenceurs seront tenus responsables envers les acheteurs.
Informer ses abonnés et sensibiliser les publics
Afin d’informer au mieux leurs abonnés, les influenceurs seront tenus d’indiquer clairement la mention « publicité » ou « collaboration commerciale » sur leurs contenus promotionnels.
De plus, les photos ou vidéos présentant des visages ou silhouettes modifiés, notamment à l’aide de filtres ou créés par intelligence artificielle, devront être accompagnées de la mention « images retouchées » ou « images virtuelles ». Ces actions seront mises en place dans le but de soigner de la santé mentale des plus vulnérables.
Une sensibilisation s’effectuera auprès des collégiens. Elle concerne les contenus sexistes, la manipulation commerciale ou encore les risques d’escroquerie en ligne. Ils prendront également connaissance des outils mis à leur disposition par les plateformes pour signaler des contenus illicites.
Une description claire de l’influenceur et de l’environnement qui l’entoure
Les quelques 150 000 influenceurs répertoriés en France possèdent dès à présent une définition de leur métier. « Il s’agit des personnes qui contre rémunération ou avantages en nature « mobilisent leur notoriété auprès de leur audience pour communiquer » en ligne « des contenus visant à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ou d’une cause quelconque« , précise la loi. Ils pourront s’appuyer sur le « Guide de bonne conduite – Influenceurs et Créateurs de contenus » en ligne, mis à disposition par le Gouvernement. On y retrouve les droits, les devoirs et la responsabilité du métier.
Entre annonceur, influenceur et agent… comment ça se passe ?
L’activité d’agent d’influenceurs, qui facilite les collaborations entre ces derniers et les marques, est aussi décrit. Les influenceurs, leurs agents ou les annonceurs seront tenus de conclure des contrats écrits au-delà d’un certain seuil de rémunération ou d’avantages en nature, qui sera précisé ultérieurement par décret. Ces contrats devront comporter des clauses obligatoires telles que les missions confiées, les conditions de rémunération et la soumission au droit français si les abonnés français sont concernés.
Afin de garantir une indemnisation adéquate des éventuelles victimes, les parlementaires ont instauré le principe d’une responsabilité solidaire tripartites. De plus, les influenceurs ciblant un public français et résidant en dehors de l’Europe – tels que ceux basés à Dubaï – devront désigner un représentant légal au sein de l’Union européenne. Ils devront souscrire à une assurance civile dans l’UE.
Les enfants d’influenceurs sont eux aussi protégés
Des mesures spécifiques ont été mises en place pour protéger les enfants influenceurs. Les règles régissant le travail des jeunes YouTubers sur les plateformes de partage de vidéos, qui étaient initialement établies par la loi du 19 octobre 2020, sont maintenant étendues à toutes les plateformes en ligne, y compris les réseaux sociaux tels qu’Instagram, Snapchat ou TikTok. De plus, les enfants impliqués dans des activités commerciales seront protégés par le code du travail. Leurs parents devront signer des contrats avec les annonceurs et mettre une partie de leurs revenus de côté (le pécule).